LE BURKINA FASO EN LUTTES !

LE BURKINA FASO EN LUTTES !

Mobilisation inédite des Acteurs de la Justice du Burkina Faso !

DECLARATION DE L’ASSEMBLEE GENERALE COMMUNE DES ACTEURS DE LA JUSTICE DU BURKINA FASO

 

 

Le 29 mars 2011 s’est tenue à Ouagadougou, dans la salle de conférence du Centre National Cardinal Paul ZOUNGRANA, une assemblée générale des acteurs de la justice, à l’appel de leurs syndicats (SAMAB, SBM, SMB, SYNAJ, SGB et  SYNAF) autour de l’ordre du jour suivant:

    I.        Examen de la situation actuelle de l’institution judiciaire

  II.        Mesures à prendre

  1. Divers

 

Près de 400 participants venus de l’ensemble des cours et tribunaux du Burkina Faso, des ministères, institutions et du barreau ont adopté la déclaration dont teneur suit :

 

Considérant que l’Etat de droit suppose préalablement l’égalité en droit de tous les citoyens ;  

 

Considérant que pour s’assurer que cette égalité va être effective, le Constituant burkinabé du 02 juin 1991 a consacré le principe de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, en édictant expressément que le juge est dépositaire du pouvoir judiciaire et que celui-ci est indépendant ;

 

Considérant que dans cette perspective, l’indépendance du juge, en tant que  garantie de l’effectivité de la séparation voulue par la Constitution, ne peut se concrétiser que si les animateurs de l’institution judiciaire, et les magistrats en particulier, sont à l’abri des pressions de quelque nature que ce soit lors du traitement des dossiers d’une part, et que l’autorité des décisions rendues par les cours et tribunaux  s’imposent à tous avec la même rigueur d’autre part ;

 

Considérant que contrairement à ces principes cardinaux consubstantiels même à l’Etat de droit, il est constaté au Burkina Faso, depuis des années, des atteintes répétées à l’indépendance des institutions judiciaires  et fréquemment au traitement des dossiers par les juges puis à l’autorité des décisions qu’ils rendent ;

 

Considérant que ces atteintes sont d’ordre textuel (problèmes liés au statut et à la gestion de la carrière des magistrats, à l’autonomie financière de l’institution judiciaire, au statut particulier du greffier, etc.) ou découle d’entraves (demande d’explication adressée à des magistrats par l’Administration relativement au traitement d’un dossier, exigence faite aux avocats de faire la preuve de la régularité de leur constitution avant de communiquer avec les personnes détenues) ; 

 

Qu’ainsi, il est fréquent de constater  le refus de certains sujets de droit, dont surtout des institutions publiques, d’exécuter les décisions ou l’interdiction de les exécuter ou encore  l’émission d’instructions administratives qui leur sont contraires, voire l’opposition armée à leur exécution comme l’attestent les derniers évènements des 22 et 23 mars 2011 à Ouagadougou, 28 et 29 mars 2011 à Fada N’Gourma et Tenkodogo ;

 

Considérant que  la cause profonde de ces graves atteintes est à rechercher cumulativement dans la culture de l’impunité dont jouissent certaines personnes, dans l’ingérence de l’exécutif ou du politique dans le domaine réservé au pouvoir judiciaire et dans l’absence de courage et de responsabilité des institutions chargées de l’exécution des décisions de justice ;

 

Considérant qu’il est constant que l’une des conséquences de cette atteinte est la rupture illégale et illégitime des principes d’impartialité, de légalité et d’égalité des burkinabè devant la loi alors qu’il est de l’intérêt de tous que ces valeurs soient sauvegardées à tout prix ;

 

Considérant que ces atteintes persistantes n’ont que trop duré et doivent urgemment cesser, d’où qu’elles viennent ;

 

Considérant que le respect effectif de l’indépendance des institutions judiciaires et de l’autorité des décisions de justice est un défi qui requiert, en général, l’engagement de tous les potentiels usagers du service public de la Justice et, en particulier, l’engagement individuel et collectif des gens de robe ;

 

Considérant que la question de l’indépendance du pouvoir judiciaire ne peut être déconnectée de celle de la sécurité de ses acteurs ;

 

Qu’en effet, la solution que le magistrat apporte à tout problème qui lui est posé (poursuites ou classement sans suite, condamnation, relaxe ou rejet de demande, non lieu ou ordonnance de renvoi etc.) est susceptible de susciter l’hostilité de l’une au moins des parties, dans la mesure où il est tenu, de par la loi, de trancher le litige à lui soumis dans un sens donné, sous peine de déni de justice ;

 

Considérant qu’il est assisté dans l’essentiel de son travail par le greffier et qu’au nom du principe des droits de la défense, les parties peuvent se faire représenter, assister ou conseiller par un avocat ;

 

Que le commun des mortels ne fait pas de distinction entre celui qui poursuit, celui qui décide, celui qui assiste ou celui qui représente ;

 

Considérant les attaques et les risques d’attaques verbales et physiques auxquelles les magistrats, les avocats et le personnel judiciaire sont exposés aussi bien dans leur lieu de travail qu’en dehors desdits lieux ;

 

Sur quoi,

 

Nous, Magistrats, Avocats, Greffiers, Agents de la Justice, réunis en Assemblée Générale Commune les jour, mois et an ci-dessus indiqués :

 

-      Condamnons les actes de destruction de palais de justice et de la maison de l’avocat, ainsi que les actes d’atteinte à l’indépendance de la justice et à la sécurité de ses acteurs ;

-      Condamnons en outre les actes portant atteinte à l’intégrité physique des personnes ainsi que les actes de pillage et de destruction des biens privés et publics ;

-      Manifestons notre solidarité avec toutes les victimes des évènements survenus ces derniers temps ;

-      Entérinons la suspension de toutes les activités juridictionnelles sur toute l’étendue du territoire national jusqu’à la réunion des conditions ci-après :

  • La réintégration immédiate et sans condition des personnes libérées en violation de la loi ;
  • La prise de mesures sécuritaires pour les acteurs de la justice ;
  • La convocation urgente d’un Conseil Supérieur de la Magistrature extraordinaire élargi pour se pencher sur la situation et le renforcement de l’indépendance de la justice ;

-      Exigeons des autorités compétentes la mise en place d’un dispositif fiable de sécurisation des palais de justice, des centres pénitentiaires ainsi que des personnes qui y travaillent ;

-      Interpellons le chef de l’Etat en sa qualité de garant de l’indépendance de la justice à prendre toutes mesures urgentes qui s’imposent afin de restaurer l’autorité de la justice.

 

 

Fait à Ouagadougou, le 29 mars 2011

 

L’Assemblée Générale Commune des acteurs de la Justice du Burkina Faso.



18/04/2011
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